Est-ce la fin de la culture web social media telle que nous la connaissons, un endroit où nous consommons les messages de nos semblables et où nous publions en retour ? C’est ce que soutient Kyle Chayka dans cet article du New Yorker.
Pour l’auteur, s’il était facile de s’amuser en ligne il y a dix ans – tomber sur un site web dont vous n’aviez jamais imaginé l’existence, recevoir un mème que vous n’aviez pas déjà vu et revu, et peut-être même jouer à un jeu vidéo dans votre navigateur –, c’est beaucoup moins évident aujourd’hui.
En cause, les géants des réseaux sociaux qui ont pris le contrôle de l’espace ouvert d’Internet, centralisant et uniformisant nos expériences en ligne par le biais de leurs propres systèmes de tri des contenus, opaques et changeants, ce qui rend difficile l’émergence de nouvelles plateformes.
La recherche sur Google est encombrée de résultats inutiles, et les hackers du SEO ont ruiné l’astuce qui consistait à ajouter la plateforme Reddit aux recherches pour trouver des réponses générées par des humains.
Depuis son rachat par Elon Musk, X (ex-Twitter) est inondé de contenus dominés par des utilisateurs vérifiés, récompensés sur la base de l’engagement que suscitent leurs messages, quelle que soit leur véracité. Les algorithmes favorisent le contenu et les comptes populaires, rendant difficile l’amplification des petites voix.
Instagram affiche de plus en plus de publications recommandées et de publicités au lieu de photos d’amis. Meta, la société mère de Facebook, développe des chatbots d’IA avec diverses personnalités “impertinentes” pour tenter de retrouver un nouveau souffle.
De son côté, TikTok limite les contenus engagés, d’actualité ou jugés trop politiques, car soumis aux politiques de censure du gouvernement chinois, au profit de vidéos divertissantes. Sous couvert de favoriser la communauté sociale et la créativité générée par l’utilisateur, le réseau social entrave l’interaction directe et la découverte. Selon Eleanor Stern, analyste littéraire et essayiste qui publie régulièrement des vidéos sur TikTok, le problème réside en partie dans le fait que les médias sociaux sont plus hiérarchisés qu’auparavant, avec d’un côté le public, et de l’autre les créateurs de contenus.
D’un lieu propice à l’échange et à la réciprocité, les réseaux sociaux sont désormais davantage des plateformes de diffusion où parler n’est plus autant nécessaire que regarder et écouter. La fin d’une ère ?
Alors certes, le monde des réseaux sociaux ne ressemble plus à ce qu’il était à ses débuts. Mais je ne pense pas qu’il soit mort pour autant ! Preuve en est l’accélération des microtendances, qui sont déjà obsolètes 24 heures après leur coup d’envoi. Et puis, si les plus grosses plateformes tendent à uniformiser les propos, d’autres lieux existent où la voix des utilisateurs reste encore audible : Reddit, Twitch, Snapchat, Discord, ou encore Roblox ou Fortnite, il ne vous reste qu’à faire votre choix en fonction des sujets ou des formats qui vous passionnent.